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samedi 12 novembre 2011

Reconquérir et reconstruire le Marché intèrieur avant de chercher à expoerter ...

"Il ya un peu de Nouriel Roubini chez notre ami Abdelmadjid Bouzidi ...! il me semble qu' inviter  M. Roubini à venir à Alger pour débattre de l'économie Algérienne pourrait être une prècieuse source d'inspiration pour nos décideurs" .... Slim Othmani

Par Abdelmadjid Bouzidi in le soir d'Algérie abdelmadjidbouzidi@yahoo.fr

Une question qui taraude nombre de concitoyens, et pas seulement les spécialistes, et d’ailleurs aussi beaucoup d’analystes étrangers : pourquoi diable l’économie algérienne n’arrive-t-elle toujours pas à entrer dans ce fameux «après-pétrole », à se diversifier et à participer activement, productivement à l’économie mondiale ? En effet, pourquoi n’arrive-t-on pas à construire une économie dynamique, productrice de richesses et d’emplois, une économie qui exploite son énorme potentiel pour rejoindre rapidement le groupe des économies émergentes ?

L’Algérie a bien sûr un problème d’institutions, c’est-à-dire de règles à respecter, de comportements à acquérir par les acteurs de l’économie, de valeurs à suivre. Il y a aussi un problème d’organisation du système économique et de choix clair à arrêter entre étatisme, économie de marché «libre et ouverte» ou économie mixte alliant Etat et marché selon le bon principe «autant d’Etat que nécessaire, autant de marché que possible». Nous avons déjà eu à traiter de cette question. Il faut bien reconnaître que l’Algérie n’a pas encore décidé de l’option à suivre une fois pour toutes et que nous assistons tantôt à quelque ouverture, tantôt, au contraire, à un bonapartisme, où l’Etat est omniprésent. Mais l’Algérie a surtout à régler la question du régime de croissance à définir et à mettre en œuvre. Poursuivre dans la voie actuelle faite de dépense publique abyssale, d’investissements, d’équipement financés par l’Etat, de redistribution et transferts sociaux n’est évidemment pas soutenable sur le moyen/long terme.

Ce que devrait être notre nouveau régime de croissance Une croissance économique robuste et durable ne peut se réaliser qu’en se fondant d’abord sur le marché intérieur. La crise économique mondiale actuelle nous le rappelle avec brutalité. Ceci ne signifie pas qu’il faut tourner le dos aux exportations mais celles-ci, pour se développer, supposent régler les contraintes de compétitivité qu’on ne peut dépasser que sur un délai assez long (la remarque est encore plus valable pour l’Algérie). Dans notre pays, un marché intérieur existe et s’est construit difficilement dans le sillage des efforts considérables d’investissements, notamment industriels, réalisés dans les années 70 (les deux plans quadriennaux notamment) et d’une salarisation massive de la force de travail. Il faut cependant souligner qu’aujourd’hui :

1/ Ce marché se réduit de plus en plus.

2/ Ce marché est capté par les produits importés par manque de compétitivité de la production nationale et par les effets de la rente qui favorise plus l’importation que la production nationale (syndrome hollandais).

Il faut ajouter que ce rétrécissement du marché intérieur n’est pas compensé par quelque marché d’exportations puisque celles-ci sont insignifiantes.


Problème : comment reconstruire notre marché intérieur ?


Les choix économiques de ces deux dernières années s’inscrivent bien dans une tentative de réponse à cette question : encadrement des importations, mise en œuvre de mesures d'une politique de préférence nationale, politique de redistribution et de transferts sociaux, politique d’emplois aidés favorable à la consommation. Le gouvernement semble avoir opté pour le protectionnisme, le patriotisme économique comme on dit aujourd’hui. On doit rappeler que la reconstruction du marché intérieur peut se faire par deux voies.

1/ En contexte d’ouverture économique, pour produire leurs effets, les aides de l’Etat n’ont de sens que si la bataille de la compétitivité est gagnée par nos entreprises pour que la production nationale puisse préserver ses parts de marché et en gagner de nouvelles face à la concurrence des importations. On voit bien que cette voie est pour l’instant impraticable pour notre pays tant notre retard dans les domaines de la performance et de la compétitivité est grand.

2/ La seconde voie est celle du protectionnisme et de la préférence nationale. C’est la voie dans laquelle semble s’engager le gouvernement (encadrement des importations, préférence nationale (favoriser les entreprises nationales dans la course aux marchés publics), revalorisation salariale et transferts sociaux, monétarisation des emplois aidés…)

Une telle voie, en contexte de mondialisation de la production et de l’économie bride l’efficacité de nos entreprises et étouffe la compétitivité de notre économie. De plus, investissements publics financés par l’Etat, redistribution et transferts sociaux supposent l’existence de ressources financières illimitées et pérennes. Ce qui, évidemment, est loin d’être le cas chez nous. Cette voie est donc insoutenable financièrement. On voit bien que le problème n’est pas simple : poursuivre dans l’ouverture sans compétitivité va produire d’énormes dégâts dans le tissu économique national.

Revenir au protectionnisme, à l’ère de «l’industrie naissante» va nous endormir (soporifique) et nous faire oublier que nos capacités de financement basées strictement sur les hydrocarbures sont limitées, et plus limitées qu’on ne le croit (épuisement des ressources d’une part mais surtout augmentation rapide de la demande nationale en hydrocarbures pour nos propres besoins) d’autre part.

Aujourd’hui, plus qu’hier encore, il s’agit pour nos décideurs d’être très vigilants face au «piège de la rente pétrolière». Sans aller jusqu’à considérer nos hydrocarbures comme une malédiction, il faut rester vigilants quant au pouvoir soporifique du pétrole. Tout cela a été maintes fois dit et écrit y compris par le président de la République ou le Premier ministre. Aujourd’hui, il faut progresser dans le «comment faire».

Le nouveau régime de croissance pour l’Algérie. Deux directions :

1) Reconstruire le marché intérieur.

Cinq séries de mesures sont à mettre en œuvre.
a/ Encadrer les importations en distinguant celles nécessaires au fonctionnement de l’outil de production et celles qui concurrencent cette production nationale.
b/ Stimuler la consommation en facilitant les crédits à la consommation des produits nationaux (si vous achetez national vous avez accès aux crédits de consommation)
c/ Soutenir l’investissement privé national PME/PMI
d/ Stimuler la politique de salarisation de la force de travail et poursuivre dans les programmes d’emplois aidés.
e/ Poursuivre dans la politique redistributive et de transferts sociaux.
La seconde série de mesures doit aider à
2) Sortir sur les marchés extérieurs La reconstruction du marché intérieur ne doit pas se faire au détriment d’une politique soutenue d’exportation hors hydrocarbures. Celle-ci ne peut se concevoir sans une politique résolue d’attractivité (à l’opposé de la démarche actuelle vis-à-vis des IDE). Pour devenir exportatrice, notre économie doit :
a/  Attirer de plus en plus d’investissements directs étrangers (IDE) ;
b/ Développer une stratégie de partenariat externe privé national-privé étranger, public national - privé étranger ;
c/ Développer des programmes de réalisation de joint-venture avec des champions régionaux et mondiaux.

Si on pouvait être bref dans un domaine où la simplification est à éviter, on pourrait tenter de résumer le programme en deux séries d’actions :

1/ Revenir à l’industrialisation par substitution d’importation.
2/ Préparer sérieusement l’économie à engager la dure bataille des exportations hors hydrocarbures
.

La tâche n’est pas simple mais elle est réalisable et largement à notre portée.